De toutes mes années à l’Union, j’ai peine à trouver une situation aussi déplorable que celle que vivent actuellement les producteurs agricoles de la baie Lavallière. Ça dépasse tout simplement l’entendement.
Ces producteurs dénoncent depuis 14 ans maintenant les pertes encourues en raison d’un ouvrage de retenue des eaux à la confluence du fleuve Saint-Laurent, de la rivière Yamaska et du bassin versant de la baie Lavallière dans la MRC de Pierre-De Saurel. Selon les experts que nous avons consultés, cet ouvrage (digue, déversoir et barrage) constituerait la principale cause des inondations répétées sur les terres avoisinantes. Autrement dit, un ouvrage mal planifié et mal géré qui crée un bouchon empêchant l’écoulement de l’eau et des sédiments du bassin versant.
Bâti au début des années 1980, l’ouvrage avait comme objectif de créer une zone protégée pour la faune. Un but louable en soi, mais comme une simple visite des lieux permet de le constater, une grande partie des boisés environnants sont aussi inondés. Les arbres meurent l’un après l’autre, au rythme de la patience des producteurs. On peut aussi douter de l’atteinte de l’objectif étant donné le piètre état de l’habitat faunique.
L’Union a multiplié les représentations dans ce dossier au fil des ans auprès de tous les paliers concernés. Or, le cas de la baie Lavallière illustre non seulement un cas typique de cafouillage gouvernemental, mais aussi une situation trop fréquente au Québec. La création de zones protégées est en effet dans l’air du temps. Dans certains cas, ce genre de projet empiète sur les activités agricoles ou forestières du secteur, avec bien peu de considérations pour les producteurs concernés qui doivent absorber les contrecoups opérationnels et financiers. La gestion de ces projets est aussi problématique, car elle est souvent confiée à des organismes qui n’ont pas l’expertise pour mener à bien leur mandat. Le manque de ressources financières est aussi une problématique importante, car après leur création, il importe d’entretenir adéquatement ces habitats. Des fonds réservés à l’aménagement et à l’entretien sont donc requis. De façon générale, le mot « cohabitation » est employé à toutes les sauces dans ce genre de projet, mais il est rarement accompagné du mot « respect » des pratiques agricoles. C’est notamment le cas dans le secteur de la baie Lavallière, où la rentabilité et même la survie de plusieurs entreprises sont remises en cause.
En attendant que des solutions à long terme soient proposées, il est impératif que des travaux d’urgence soient réalisés dans les plus brefs délais.
Nous sommes déjà au début du mois d’avril. Comme chaque année, ces producteurs doivent se demander s’ils pourront semer et, si c’est le cas, s’ils pourront récolter.
Même si plusieurs auront recours au programme d’indemnisation de la Financière agricole du Québec, qui prévoit des compensations pour le futur, rien pour l’instant n’est prévu pour compenser une situation financière qui s’est détériorée dramatiquement au fil des ans. Pour certaines entreprises, c’est même leur survie qui est compromise dès cette année si rien n’est fait.
Les solutions existent. Il est temps que les instances politiques et gouvernementales concernées cessent de se lancer la balle et passent à l’action. Sinon, il leur appartiendra d’expliquer à des familles qui cultivent la terre dans ce secteur depuis 10 générations et qui essuient des pertes financières depuis 14 ans pourquoi elles en sont rendues là.