Les inondations de la dernière année dans plusieurs régions du Québec ont relancé le débat sur la gestion des eaux. En zone habitée, ces inondations ont des conséquences dramatiques pour les populations concernées. En milieu rural, un mauvais entretien des cours d’eau peut s’avérer tout aussi problématique pour les entreprises agricoles aux prises avec des champs mal drainés.
Depuis plusieurs années, un grand nombre de producteurs agricoles réclament un meilleur entretien des cours d’eau en milieu rural. Le bon drainage des terres est en effet essentiel au maintien de conditions propices au travail du sol et à la croissance des cultures. Notre climat humide force l’évacuation des eaux en excès, sans quoi les rendements sont lourdement hypothéqués. Un mauvais drainage des terres cultivées engendre aussi des problèmes d’ordre environnemental : engrais moins efficaces, augmentation du ruissellement de surface et de l’érosion des sols, hausse de la production de gaz à effet de serre, vulnérabilité accrue des cultures aux insectes et maladies, etc.
De 1960 jusqu’au début des années 90, le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec s’occupait des travaux d’entretien pour le compte des municipalités. Depuis l’entrée en vigueur en 2006 de la Loi sur les compétences municipales, les municipalités régionales de comté (MRC) ont été chargées de de l’entretien des cours d’eau en milieu agricole. Le transfert graduel et définitif de cette obligation au monde municipal ne s’est pas fait sans difficulté. Un pareil changement nécessite en effet plusieurs ajustements. Les agriculteurs s’attendent toutefois à ce que les MRC assument leurs responsabilités.
De nombreux agriculteurs un peu partout au Québec déplorent l’inaction de leur MRC et les pertes économiques qui en découlent. Même si certaines MRC se sont donné les moyens pour accomplir adéquatement cette tâche, d’autres ont en effet des lacunes à combler. Diverses raisons, comme l’inégalité des ressources d’une MRC à une autre peuvent expliquer cette situation. Une certaine méconnaissance des effets nuisibles d’un mauvais drainage des terres est aussi une possibilité. Saviez-vous que l’adoption de pratiques de conservation des sols, telles que le semis direct, est impossible sur une terre gorgée d’eau?
La responsabilité des MRC en matière de cours d’eau concerne aussi leur écoulement. En cas d’obstruction menaçant la sécurité des personnes et des biens, elles ont l’obligation de réaliser les travaux requis pour rétablir l’écoulement normal. Lorsque l’obstruction est causée par la sédimentation progressive affectant les terres agricoles, certaines MRC y voient toutefois une simple « possibilité d’agir », les terres n’étant pas toujours perçues comme des biens à protéger. Nous sommes fortement en désaccord avec cette interprétation, mais ce n’est pas l’objet de cette rubrique.
Nous souhaitons plutôt profiter de cette tribune pour sensibiliser les représentants du monde municipal à l’importance d’entretenir le réseau de drainage des terres agricoles. Toutes les MRC, puisqu’elles ont la possibilité et la compétence d’agir, devraient se faire un devoir de réaliser ces travaux, lorsque requis. Il en va du maintien de la qualité des terres cultivées sur leur territoire, de leur productivité et de la richesse qui en résulte. En fin de compte, ce sont nos communautés rurales qui en sortiront gagnantes et leur vitalité contribue à l’essor de tout le Québec.
Chronique « Agriculture »
Revue Marché municipal
Édition mars 2018
Charles-Félix Ross, directeur général