Chaque année, la Confédération rencontre les conseils d’administration des groupes affiliés à l’Union. Nous faisons le tour de nos principaux dossiers et discutons des enjeux plus spécifiques à chacun des groupes. Naturellement, ces enjeux varient d’une région et d’un secteur à l’autre, mais cette année, un sujet ressort dans presque toutes nos rencontres. Il s’agit de la fiscalité foncière agricole.
Les nouveaux rôles d’évaluation dans plusieurs municipalités de Lanaudière, de la Montérégie, des Basses-Laurentides, de Laval, du Centre-du-Québec, de la Chaudière-Appalaches et de l’Estrie démontrent que le problème est généralisé. Cette semaine, les agriculteurs de Compton en Estrie se sont réunis devant les bureaux de la municipalité pour dénoncer la situation. D’autres groupes de producteurs se demandent comment se faire entendre à la fois par leur municipalité et le gouvernement.
Nous savons maintenant que les délais législatifs ne permettront pas d’apporter de solution avant 2021.
Le dépôt d’un projet de loi l’automne prochain et les délais habituels pour son adoption ne permettront pas son application dès l’année 2020. C’est pourquoi nous demandons un gel des taxes foncières agricoles d’ici l’application du projet de loi en 2021. Cette année, il en coûte 17 M$ de plus à l’État, incluant les 9 M$ supplémentaires pris à même le budget du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ). L’an prochain, le MAPAQ devrait débourser un montant supplémentaire encore plus important, tout comme les producteurs.
Les coûts supplémentaires ne sont attribuables qu’à la hausse des rôles d’évaluation, ceux-ci étant principalement basés sur les transactions de terres à la marge ou acquises par des promoteurs immobiliers au pourtour des communautés urbaines. Si l’on ne trouve pas une façon de limiter la valeur taxable du foncier agricole, on ne fait que remettre le problème à plus tard. La pression sur la valeur des terres va demeurer et même s’accroître. Plus la valeur foncière augmente, plus il est périlleux, pour les jeunes, de démarrer une entreprise ou de prendre la relève de la ferme familiale. Vendre devient plus intéressant qu’acheter, et ce n’est pas de bon augure pour l’avenir de l’agriculture familiale.
L’argent alloué aux municipalités par l’entremise du Programme de crédit de taxes agricoles (PCTFA) n’est pas structurant pour le secteur. Il est inquiétant d’entendre que pour certains, ce programme s’ajoute aux autres interventions du gouvernement pour le secteur agricole. L’Ontario applique un taux distinct aux terres et compense les municipalités par le biais de son pacte fiscal. Le crédit ainsi obtenu par le taux distinct ne s’additionne pas aux interventions du ministère ontarien de l’Agriculture à l’endroit des fermes et n’est pas calculé en tant que soutien agricole.
Nous sommes à un tournant. Lors de la campagne électorale, le gouvernement de François Legault a pris l’engagement de régler cette situation. Les demi-solutions nous ont amenés où nous en sommes aujourd’hui. La sourde oreille des municipalités (seulement 57 d’entre elles appliquent un taux distinct), qui prétendent que cet enjeu ne les concerne pas et qu’il revient au gouvernement de le régler, démontre qu’une partie de la solution devra sans doute être imposée.
L’Union demande depuis longtemps de s’asseoir avec les unions municipales, le MAPAQ et le ministère des Affaires municipales et de l’Habitation pour trouver une solution durable. Cette solution passe sans doute par des aménagements au pacte fiscal. Nous comprenons très bien que les municipalités ont besoin de financement, mais on ne peut continuer de financer les services aux citoyens au moyen du PCTFA.
Éditorial La Terre de chez nous
Semaine du 1er au 7 mai 2019
Marcel Groleau, président général