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L'invasion des... « coqs d'Inde »!

Publié le 11 mai 2015 - Écrit par Michel Tessier

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Quand Christophe Colomb a mis le pied en Amérique, se croyant aux Indes, il a baptisé « coq d’Inde » le premier dindon sauvage qu’il a croisé.Après plus de cent ans d'absence, le dindon sauvage fait un retour dans nos contrées canadiennes. Les changements climatiques, mais surtout les lâchers de dindons en provenance des États-Unis, expliquent l’augmentation rapide de la population de cet animal. Il y en aurait quelque 20 000 dans la seule région de l'Outaouais et ils sont très nombreux en Estrie, en Montérégie et au Centre-du-Québec. Ils sont aussi de plus en plus visibles en Mauricie, résultat d’opérations de déplacement de dindons (une soixantaine) à Notre-Dame-du-Mont-Carmel et à Saint-Prosper. Ce n’est pas encore confirmé, mais ces volatiles auraient été aperçus aussi loin qu’à La Tuque.  La Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs, qui a contribué à l’expansion du dindon avec son programme de relocalisation, elle, y voit un franc succès.

Cocasse mais…

Animal inhabituel dans notre environnement, se déplaçant en groupe, la première fois que l’on aperçoit ce gros animal à plume constitue toujours une belle surprise. Contrairement à leurs cousins domestiques, ils volent très bien, même avec leur 10 kg de poids.  Les dindons mangent avec appétit bulbes, fruits, racines, graminées, insectes et même de petits amphibiens.  Le dindon n’hésite pas à s’approcher des habitations et des bâtiments agricoles.  Sa présence dans les hangars à la recherche de grains, ses pique-niques dans les cultures de soya, de maïs ou de petits fruits (fraises, argousiers, raisins…) constituent l’autre revers de la médaille. Des essais d’effarouchement avec des chiens n’ont pas donné de résultats.  De plus, des craintes concernent les fientes de cette volaille qui pourraient, potentiellement, constituer un vecteur de maladie.

Là pour rester

Le dindon serait doté d’une ruse légendaire. Des chasseurs affirment aimer mieux chasser le dindon que le chevreuil, pour le défi. On estime que seulement un chasseur sur cinq réussit à abattre son dindon.  D’ailleurs, on ne s’improvise pas chasseur de dindon. Pour obtenir un permis de chasse, il faut suivre un cours d’une durée de six heures sur la biologie du dindon. Il s’agit d’une chasse difficile et il semble que la récolte annuelle est bien faible, favorisant une croissance des populations.

Dindons et orignaux sur un même pied…

L’UPA a participé récemment aux rencontres techniques de la Table nationale de la faune  afin de commenter les orientations  proposées par le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP). En effet, comme pour l’orignal, le ministère est à élaborer un plan de gestion du dindon sauvage qui se déploiera de 2016 à 2023.  Il n’est donc pas question d’éradication ce nouveau venu, mais bien de contrôle des populations, de calendrier de chasse, de valorisation de cette bête à plumes.

Nous y avons fait valoir l’urgence de la mise en place d’un système de suivi des populations afin de comprendre comment elles évoluent. Déjà, il faut prévoir les répercussions potentielles et prendre en considération tant la capacité de support biologique que celle de l’acceptabilité sociale.  Nous soutenons qu’il faut :

  • interdire les lâchers et relocalisations de dindons sauvages;
  • octroyer une autorisation spéciale aux producteurs agricoles pour chasser ou faire chasser les dindons sauvages causant des dommages à leurs récoltes;
  • autoriser une chasse d’automne pour tous les segments (mâle, femelle et juvénile)

De plus, il faut documenter les pertes reliées à la déprédation des cultures subies par les producteurs et productrices agricoles et forestiers et tout mettre en œuvre pour les minimiser.

Conflit d’usage à l’horizon…

Réintroduire un oiseau étranger, sans réels prédateurs, pour le développement d’une activité récréative de chasse, pourquoi pas? Sommes-nous en train de paver la voie à un nouveau parasite agricole?

Alors, quand vous entendrez un retentissant glouglouglouglou dans la forêt… gardez en tête que nous n’avons qu’un seul territoire à partager où les gestes de l’un ont des répercussions sur les activités de l’autre…