Dans l’attente d’une solution durable à la croissance fulgurante des rôles d’évaluation ces dernières années, l’Union des producteurs agricoles (UPA) demande au gouvernement du Québec un gel immédiat des taxes foncières agricoles sur tout le territoire.
Les agriculteurs attendent depuis 2005 une refonte de la fiscalité foncière agricole. La Coalition Avenir Québec s’est montrée sensible à cette problématique lors de la campagne électorale. Chaque année qui passe met davantage d’entreprises agricoles en péril. Il faut agir maintenant, a déclaré le président général de l’UPA, Marcel Groleau.
Les agriculteurs ont besoin de grandes superficies de terre pour exercer leur métier. C’est pourquoi la plupart des pays ont des lois ou des programmes pour exempter ou limiter les taxes applicables au territoire agricole. L’Ontario utilise un taux distinct équivalent à 25 % du taux résidentiel alors que l’Australie n’applique pas de taxes au foncier agricole. Au Québec, le Programme de crédit de taxes foncières agricoles (PCTFA) a pour objectif de rétablir une certaine équité entre les producteurs et les autres usagers du territoire en assumant une partie de la facture.
Or, la valeur moyenne des terres en culture a plus que triplé ces dix dernières années, alors que l’augmentation du budget alloué au PCTFA est plafonnée à 5 % des dépenses de l’année précédente. La valeur des terres augmente donc beaucoup plus rapidement que le budget du programme. En conséquence, la part des taxes foncières payée par les producteurs a augmenté de 66 % entre 2007 (35,7 M$) et 2019 (59,2 M$), malgré l’existence du PCTFA et en dépit de l’aide annoncée pour 2017 à 2020 inclusivement (44,7 M$).
Selon les données du ministère des Affaires municipales et de l'Habitation, la croissance de la valeur des immeubles agricoles est supérieure à celle de la valeur des immeubles résidentiels depuis plusieurs années. En 2017 (plus récentes données disponibles), la croissance de la valeur des immeubles agricoles a été de 32 %, alors que celle des immeubles résidentiels a été de 12 %.
Environ 1 000 municipalités québécoises possèdent des immeubles agricoles sur leur territoire. De ce nombre, seulement 57 ont appliqué un taux distinct en 2017, soit moins de 6 % des municipalités. Comme le mentionnait récemment la mairesse d’une municipalité de la Montérégie, la « problématique de la valeur des terres agricoles relève du provincial; c’est pourquoi le ministère accorde un crédit de taxes afin de permettre aux municipalités de compenser les producteurs agricoles ».
Cette façon commode de s’en laver les mains reflète malheureusement la position d’un grand nombre d’élus municipaux. Cela explique aussi une grande partie de la croissance des coûts du PCTFA et de la part des taxes foncières assumée par les agriculteurs. Trop de municipalités se servent des terres agricoles pour financer des services municipaux qui ne sont pas exclusivement destinés aux producteurs (corps policiers, service des incendies, loisirs, etc.). Ce n’est pas au ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) de contribuer au financement de tels services.
Ajoutons que ces augmentations successives compromettent l’admissibilité d’un nombre croissant d’entreprises au PCTFA, car l'exploitation agricole enregistrée doit obligatoirement générer un revenu agricole brut annuel d’au moins 5 $ par 100 $ de valeur foncière admissible. Chaque augmentation annuelle rend plus difficile le respect de ce critère. Des changements au PCTFA, à la Loi sur la fiscalité municipale et à la Loi sur le MAPAQ sont requis dans les plus brefs délais.
Les montants annoncés par le gouvernement du Québec pour amoindrir l’impact de l’augmentation des rôles d’évaluation sont les bienvenus. L’équité en matière de taxation n’est toutefois pas assurée pour autant, surtout dans les régions où la pression sur la valeur des terres est la plus forte et aux abords des grandes villes. Dans l’attente d’une solution durable, un gel immédiat des taxes foncières agricoles s’impose, a conclu le président général de l’UPA.