Vous vous pensez à l’abri de toute poursuite criminelle ou civile lorsque vous posez un geste pour protéger vos animaux en cas d’attaques de chiens ou d’animaux sauvages? Tel n’est pas le cas!
Dans une décision rendue en 2020, la Cour du Québec a condamné un producteur agricole pour avoir volontairement tué un chien qui pourchassait ses poules. Ce dernier soulevait la défense des biens pour excuser son geste. La juge a rappelé les règles applicables à ce moyen de défense avec des exemples impliquant des agriculteurs ailleurs au Canada. Dans les cas rapportés, des chiens étaient en cause et les producteurs ont été condamnés pour les avoir abattus, « alors qu’il était prématuré de le faire. »
Si vous devez intervenir, respecter les conditions suivantes :
- Le danger pour vos animaux doit être « réel et imminent »;
- L’usage de la force est permis pour les protéger si cette force est « nécessaire »; la blessure ou le préjudice causé à l’animal ne doit pas être disproportionnel à « la menace que vous souhaitez prévenir »;
- Aucun autre moyen (que la force utilisée) n’est disponible pour éviter un dommage à vos animaux.
Dans l’affaire précitée, la Cour admettait que les volailles du producteur étaient à risque. Elle a néanmoins conclu que ce dernier avait fait usage de force excessive à celle qui était nécessaire pour les protéger. Selon la juge, au moment d’abattre le chien, le danger n’était alors pas « imminent ». Le producteur aurait donc dû tenter d’utiliser d’autres moyens moins draconiens : par exemple faire fuir le chien en courant après, utiliser des outils de jardinage pour l’éloigner, tirer des coups de feu dans les airs pour l’effrayer.
Dans ses commentaires, la juge souligne que le producteur ne pouvait non plus ignorer la nouvelle réalité liée au statut de l’animal à la suite de l’entrée en vigueur de la Loi sur le bien-être et la sécurité de l’animal.
Une condamnation pour avoir volontairement : « tué ou causé une douleur, une souffrance ou blessure à un animal ou un oiseau sans excuse légitime » est passible de peines sévères1. En plus du casier judiciaire, des interdictions multiples peuvent aussi s’appliquer2.
Enfin, le producteur fautif pourrait devoir indemniser le propriétaire de l’animal pour sa perte fi nancière devant le tribunal civil. La prudence est donc de mise avant de poser un geste pour « défendre ses animaux ».
1. Article 445 (2) et 445.1 (2) du Code criminel : Emprisonnement maximal de 5 ans dans les cas plus graves ou amende maximale de 10 000 $ et/ou emprisonnement maximal de 18 mois dans les cas d’infractions dites sommaires.
2. Interdiction de posséder des animaux pour une période donnée sauf pour les fi ns du travail, interdiction de posséder des armes à feu en cas d’usage négligent de l’arme.
Par Me Marie-Andrée Hotte
Me Hotte cumule plus de trente ans d’expérience en litige civil ainsi qu’en litige pénal. Elle possède une pratique variée en droit des assurances, en droit des obligations et en matière de responsabilité civile et pénale. Au fil des ans, elle a aussi développé une expertise particulière dans le domaine de l’énergie.
La chronique juridique est une vulgarisation de l’état du droit en vigueur uniquement au moment de sa publication et ne constitue pas une opinion, un conseil ou un avis juridique. Nous vous invitons à consulter un avocat ou un notaire pour connaître les règles particulières applicables à une situation donnée.
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