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Les gardiens des champs : l'engagement des agriculteurs canadiens pendant les guerres mondiales

Publié le 11 novembre 2024 - Écrit par Émilie Bolduc

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  • Chroniques de la Mauricie
  • Actualités

En ce Jour du Souvenir, nous nous rappelons non seulement des soldats au front, mais aussi des agriculteurs canadiens qui, sur leur propre terre, ont mené un combat tout aussi crucial. L’agriculture canadienne, pierre angulaire de l’effort de guerre, a joué un rôle essentiel pour nourrir la population et soutenir nos alliés outre-mer, même en période de crise. À travers les deux guerres mondiales, les agriculteurs canadiens ont fait preuve d'une résilience incroyable, transformant leurs efforts en une véritable « armée des champs ».

L'agriculture sous pression : l'expansion durant la Première Guerre mondiale

Pendant la Première Guerre mondiale, le Canada s’est rapidement tourné vers l'augmentation de sa production agricole, encouragé par le gouvernement fédéral pour répondre aux besoins d’approvisionnement des alliés. L’agriculture est devenue un élément vital de l’effort de guerre, et les exportations de blé, de viande, de fromage, de poisson et d’autres denrées essentielles se sont envolées. Les familles rurales, bien que prospères grâce à cette demande accrue, ont fait face à des conditions difficiles, notamment dans les Prairies, où la sécheresse, la chaleur et l'épuisement des sols freinaient la production malgré des exploitations toujours plus grandes.

Les agriculteurs, accablés par la pénurie de main-d’œuvre, ont alors lutté contre la conscription de leurs fils en 1917. Initialement exemptés, ces derniers ont finalement été appelés à rejoindre les rangs militaires en 1918, provoquant la colère et le sentiment de trahison des communautés agricoles. En réponse, le gouvernement canadien a lancé des initiatives pour combler cette pénurie de main-d'œuvre, notamment avec les « Soldats de la terre » (SDT), un programme qui recrutait des adolescents pour aider à la ferme. De même, les « Farmerettes », un programme destiné aux femmes, a permis d’assister les familles agricoles en l’absence des hommes.

Chargement d’un wagon. Mention : William James Topley / BAC. L'album de la grande guerre Ce lien s'ouvrira dans une nouvelle fenêtre

La Grande Dépression et la Deuxième Guerre mondiale : un redressement crucial

Après la Grande Dépression de 1929, l'agriculture canadienne se remettait difficilement lorsque la Seconde Guerre mondiale a éclaté en 1939. Des surplus de production, particulièrement de blé, permettaient d’approvisionner le pays et de répondre aux besoins de guerre. Le gouvernement fédéral créa alors l'Office du ravitaillement en produits agricoles pour gérer les demandes internes et externes. En 1943, cette structure fut remplacée par la Commission des denrées agricoles, une institution renforcée pour centraliser toute la production en un programme unifié. Cette même année, la contribution canadienne aux ressources alimentaires mondiales fut officiellement reconnue lorsque le Canada obtint un siège au sein de l’Allied Combined Food Board, soulignant le rôle vital des denrées canadiennes dans le soutien des forces alliées.

Soutien aux alliés britanniques : des tonnes de denrées malgré les risques

Avec l’Europe continentale sous le contrôle allemand, le Royaume-Uni dépendait de plus en plus de l’Amérique du Nord pour survivre. Les agriculteurs canadiens ont répondu de manière héroïque : près d’un milliard et demi de kilos de bacon et plus de 325 millions de kilos de cheddar ont été expédiés vers la Grande-Bretagne, malgré la menace des sous-marins allemands qui ciblaient les navires en mer. Les Canadiens ont trouvé des moyens novateurs pour surmonter les défis logistiques : les œufs étaient transformés en poudre et le lait condensé, tandis que des usines déshydrataient des légumes comme les choux, les carottes et les pommes de terre pour réduire le volume et faciliter le transport.

Ces produits, bien que peu gastronomiques, ont été une ressource indispensable pour les Britanniques, qui tenaient la ligne de front en partie grâce aux approvisionnements canadiens.

Les défis d’une main-d’œuvre épuisée et les efforts d’entraide

La guerre n’a pas seulement demandé des efforts aux soldats, mais aussi aux agriculteurs qui, souvent privés de main-d’œuvre, ont dû faire preuve de créativité et de solidarité pour maintenir leur production. En plus des jeunes des SDT et des Farmerettes, l'aide temporaire est venue de groupes aussi variés que les étudiants, les prisonniers de guerre et les soldats de la défense territoriale. Même des équipes de moissonneurs, se déplaçant de région en région, ont contribué à combler les besoins.

Il nous faut des aliments mais le cultivateur a besoin d'aide. Musée canadien de la guerre Ce lien s'ouvrira dans une nouvelle fenêtre

Un héritage de résilience et de service

Le rôle des agriculteurs canadiens pendant les guerres mondiales va bien au-delà de la simple production alimentaire. Leur travail acharné, leur esprit de sacrifice et leur capacité à surmonter les difficultés ont permis de soutenir le pays et de contribuer à la victoire des alliés. En ce Jour du Souvenir, rendons hommage à ces héros des champs qui, bien que souvent oubliés, ont joué un rôle aussi important que celui des soldats en uniformes. Leur engagement et leur résilience ont permis de nourrir des nations entières et de soutenir l’effort de guerre dans des moments de besoin extrême. Aujourd'hui, nous nous souvenons d'eux, reconnaissants pour leurs sacrifices et leur indéfectible dévouement à la nation et à la liberté.