Lorsque la propagation du virus de la COVID-19 est devenue mondiale, tous les pays ont été pris au dépourvu. Les systèmes de santé ont vite été débordés et le confinement est rapidement devenu la seule option pour limiter la contagion. De là la fermeture des frontières, des écoles et la cessation de toutes les activités non essentielles. C’était la situation au mois de mars 2020. Dix mois plus tard, il est stupéfiant de constater le niveau d’improvisation et le manque de cohérence dans les mesures imposées aux frontières, alors que la deuxième vague, que tous avaient prédite, nous frappe de plein fouet.
La frontière terrestre avec les États-Unis est fermée depuis mars dernier, sauf pour le transport des marchandises et les déplacements essentiels. Mais curieusement, la frontière aérienne ne l’est pas. Des citoyens canadiens ont donc profité de la période des Fêtes pour aller au soleil, d’autant plus que les écoles étaient fermées au début janvier. Soudain, devant ce flot de voyageurs fuyant les mesures de confinement, et la réaction de l’opinion publique qui en résulte, le gouvernement canadien exige, à quelques heures d’avis, que les gens qui viennent ou reviennent au Canada aient subi un test de dépistage de la COVID-19 et présentent un résultat négatif. La période d’isolement de 14 jours au retour demeure obligatoire. Bien entendu, cette nouvelle mesure s’applique aux travailleurs étrangers temporaires et saisonniers.
La très grande majorité des quelque 15 000 travailleurs étrangers temporaires et saisonniers qui viennent chaque année prêter main-forte aux entreprises agricoles québécoises sont issus du Mexique, du Guatemala et de la Jamaïque. J’anticipe des problèmes pour ces travailleurs, à qui on exige maintenant de passer ce test. Les délais très courts ne permettent pas d’apporter les ajustements demandés. Des vols seront sans doute reportés, avec les coûts que cela entraîne pour les producteurs agricoles qui emploient ces travailleurs. Depuis mars dernier, les producteurs demandent de la prévisibilité. Personne ne remet en question la nécessité de certaines mesures, voire un test de dépistage, mais encore faut-il avoir le temps de les implanter pour en minimiser les coûts et les impacts.
Dans l’état actuel des choses, au-delà de l’aspect financier et compte tenu du court délai entre l’annonce de la nouvelle mesure et son entrée en vigueur, un nombre important d’entreprises agricoles qui comptent sur l’arrivée de leurs travailleurs en ce début d’année (près de 400 travailleurs en janvier et 600 en février) se retrouvent devant le fait accompli, sans délai pour s’ajuster.
Les mesures sont décrétées à la dernière minute, improvisées et appliquées sans consultation, alors que nous vivons avec cette pandémie depuis maintenant 10 mois. Les entreprises agricoles comprennent que les questions de santé publique doivent être traitées de façon prioritaire. Mais dans le cas qui nous préoccupe, alors qu’il était prévisible que les gens profitent des Fêtes pour voyager (d’ailleurs, certains parlementaires l’ont fait) et que rien n’a été fait pour limiter les voyages non essentiels par voie aérienne, imposer sans délai les tests de COVID-19 aux travailleurs étrangers est inacceptable compte tenu des conséquences pour les employeurs.
L’an dernier, le temps passé à trouver des solutions pour la venue des travailleurs étrangers a été énorme. Alors que l’année débute et que ce dossier devrait être une priorité pour le gouvernement canadien, ce que nous vivons actuellement et le peu de considération des impacts pour les employeurs qui attendent leurs travailleurs m’indigne.