Déclenchée le 15 août dernier, la campagne électorale fédérale est loin de soulever les passions jusqu’à maintenant. Le moment choisi, en pleine période estivale, y est probablement pour quelque chose.
La plupart des gens reviennent de vacances et nous sommes en pleine rentrée scolaire. Alors que la quatrième vague de la pandémie prend de l’ampleur et que les mesures sanitaires se resserrent, on peut comprendre que les gens s’intéressent peu à la campagne. Pour plusieurs, l’adage du comptable, chroniqueur et auteur bien connu Pierre-Yves McSween est tout à fait de circonstance : « En avait-on vraiment besoin? ».
Mais pour ceux qui suivent de plus près les activités du Parlement, le déclenchement de cette élection à ce moment-ci n’est pas une grande surprise. Le système parlementaire canadien est conçu pour être dirigé par des gouvernements majoritaires. Les gouvernements minoritaires n’ont jamais une très longue espérance de vie. « J’ai besoin que le Parlement fonctionne », disait ce printemps le premier ministre Justin Trudeau, accusant les partis d’opposition de retarder l’adoption de divers projets de loi. « Le premier ministre confond Parlement qui fonctionne et Parlement qui obéit », rétorquait le chef du Bloc Québécois Yves-François Blanchet.
La politique dans nos systèmes parlementaires, c’est avant tout l’affaire des partis politiques. Leurs prises de position et leurs priorités sont souvent déterminées en fonction des gains potentiels sur le plan médiatique et en vue des prochaines élections. Le rôle des députés est très limité. Ils ont peu d’espace pour s’exprimer, que ce soit au sein du gouvernement ou dans l’opposition. Ces derniers relaient les positions et priorités du parti, la plupart du temps définies par le chef et son entourage immédiat.
On critique souvent les débordements du système politique de nos voisins étatsuniens. Mais ceux-ci, allergiques à la monarchie et à la concentration du pouvoir, ont décidé dès la création du pays de partager la gouvernance de l’État entre la présidence, la Chambre des représentants et le Sénat. Chaque composante a besoin des deux autres pour faire avancer un projet de loi. Tractations, négociations et compromis sont nécessaires et continus. La partisanerie est pourtant bien vivante aux États-Unis, mais il est fréquent de voir des républicains appuyer des projets de loi démocrates, et vice et versa, chose impensable chez nous. Ici, c’est la ligne de parti, à la vie, à la mort.
À ce stade-ci de la campagne, les analystes prédisent que le prochain gouvernement sera fort probablement minoritaire. La scission entre l’ouest et l’est du pays, celle entre les régions rurales et urbaines et la présence du Bloc québécois rend plus difficile qu’autrefois la formation d’un gouvernement majoritaire libéral ou conservateur.
L’Union va bien sûr profiter du scrutin pour interpeller chaque formation politique sur les enjeux agricoles et forestiers. Nous rencontrerons les candidats et poserons les questions qui nous préoccupent. J’y reviendrai dans mes prochains éditoriaux. Mais sincèrement, j’espère que les 338 députés qui seront élus le 20 septembre pourront délaisser quelque peu la partisanerie et faire preuve de plus de collaboration. C’est ce que les électeurs attendent d’eux, que le gouvernement soit minoritaire ou majoritaire.