À titre de membre du conseil d’administration de la Fédération canadienne d’agriculture (FCA), j’ai eu l’occasion de participer, le 24 octobre dernier, à une journée de sensibilisation des parlementaires et sénateurs fédéraux aux principaux enjeux agricoles du pays.
La FCA avait préparé, pour l’occasion, un document intitulé Rapport sur la santé financière des exploitations agricoles, dans lequel elle décrit l’impact du contexte économique difficile sur les agricultrices et les agriculteurs au pays. « Le revenu net des agriculteurs canadiens a chuté de 8,3 % en 2022, parce que la croissance des dépenses a dépassé la hausse du revenu agricole; et les dépenses totales des exploitations agricoles (après remises) ont augmenté de 21,2 % en 2022, la plus forte hausse depuis 1974 (+22,0 %) », peut-on lire dans le document.
Ce dernier fait aussi référence à la série de hausses du taux directeur de la Banque du Canada (BDC) et à son incidence sur la dette agricole canadienne, qui a atteint un niveau record de 138 G$ en 2022 (27,2 G$ au Québec). « La hausse des coûts d’emprunt a un impact sur les décisions d’investissement, ce qui aura des conséquences à long terme sur la productivité », précise à juste titre le document, qui mentionne aussi que les agricultrices et les agriculteurs canadiens, parallèlement à cette pression grandissante, « sont confrontés à une série croissante d’événements climatiques extrêmes qui mettent à l’épreuve les limites et l’efficacité de l’ensemble des programmes de gestion des risques du Canada ».
Soulignons à cet égard qu’une aide fédérale de 219 M$ (Agri-relance) a été annoncée à l’intention des agriculteurs et des éleveurs de l’Ouest canadien, le 20 octobre dernier, en raison des frais encourus par les sécheresses et les feux de forêt. Du côté québécois, les productrices et les producteurs affectés par les événements climatiques extrêmes manifestent des besoins tout aussi importants et devraient donc bénéficier de la même célérité.
Le document de la FCA, disponible sur le site Web de l’organisation, explore en détail tous ces éléments préoccupants. Près d’une vingtaine de recommandations sont formulées pour faire face à l’augmentation des coûts de production, améliorer les programmes de gestion des risques, promouvoir une croissance stable et durable et mieux soutenir les nouveaux arrivants et les jeunes de la relève. Je vous invite à en prendre connaissance, d’autant plus qu’il a suscité un vif intérêt chez les parlementaires.
Nos échanges ont bien sûr porté sur le contexte économique difficile et l’importance de mieux soutenir les entreprises agricoles au pays. Des dossiers plus spécifiques, comme le Programme de paiements anticipés, la déduction pour amortissement accéléré, la gestion des risques de l’entreprise et la Stratégie pour une agriculture durable, ont aussi été abordés.
L’évolution au Sénat des projets de loi C-282, qui vise à protéger les secteurs sous gestion de l’offre dans les futures négociations commerciales, et C-234, qui prévoit une exemption de la tarification fédérale du carbone pour le propane et le gaz naturel (dans le secteur agricole), a aussi fait partie des discussions. Mentionnons que les productrices et producteurs québécois ne sont pas concernés directement par la tarification fédérale du carbone (le Québec disposant de son propre système de tarification). Mais l’adoption de ce projet de loi entraînerait encore plus d’enjeux de compétitivité au Québec, notamment dans le secteur des grains.
Les quelque 40 parlementaires et sénateurs rencontrés par les divers représentants de la FCA, dans le cadre de cette journée de sensibilisation, comprenaient très bien l’importance économique de l’agriculture canadienne (contribution de 36,2 G$ au PIB du Canada; 257 000 emplois à l’échelle du pays) ainsi que son rôle stratégique pour le dynamisme des communautés rurales et l’alimentation des consommateurs d’ici et d’ailleurs. Souhaitons que cette compréhension continue de favoriser des discussions constructives et sans partisanerie lorsqu’il est question d’agriculture et d’alimentation. Espérons aussi que leurs interventions au cours des prochains mois, toutes formations politiques confondues, seront à la hauteur des attentes et des besoins des agricultrices et des agriculteurs.