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Élection présidentielle : des années difficiles pour le Canada

Publié le 16 novembre 2016 - Écrit par Marcel Groleau, président général

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L’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis a provoqué une onde de choc partout sur la planète. Personne, ou presque, n’avait prédit sa nomination à titre de candidat à la présidence pour le Parti républicain, et encore moins sa victoire contre Hillary Clinton.

Les élections se jouent au moment du scrutin et les résultats sont largement déterminés par le courant populaire qui précède le jour du vote. Les sondages menés semaine après semaine apportent du matériel aux chroniqueurs et aux experts, qu’on se lasse d’entendre. Eux aussi, je crois, finissent par ne plus s’écouter, plus enclins à démontrer que leur hypothèse se confirme, plus le jour du vote approche.

Le choix d’un candidat repose sur les émotions qu’il suscite. Nos valeurs, la peur, la haine et l’espoir guident nos choix. Voter, c’est avant tout un geste émotif. Les deux candidats à la présidence américaine soulevaient beaucoup d’émotions et le vote a été très serré. Hillary Clinton a gagné le vote populaire, mais le système électoral américain a porté Trump à la présidence.

Pour le Canada, ce n’est pas une bonne nouvelle.

M. Trump, durant la campagne, voulait ériger un mur à la frontière du Mexique, aux frais de celui-ci, retourner dans leur pays d’origine les millions d’immigrants illégaux et bloquer l’immigration musulmane. Il souhaitait aussi déchirer l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) pour récupérer les emplois supposément perdus, larguer le Partenariat transpacifique et mettre un frein à la lutte aux changements climatiques qui ne sont pas, selon lui, causés par les humains. Bien sûr, il ne réalisera pas toutes ses promesses, mais ça donne une bonne idée de ses intentions.

Plus largement, cette élection s’inscrit dans un courant mondial de repli. L’opposition populaire aux politiques d’immigration et aux accords commerciaux multilatéraux est bien réelle. Le Royaume-Uni a décidé de quitter l’Union européenne en grande partie pour ces raisons. Dans plusieurs pays, on constate une montée de la droite populiste, qui carbure à la peur. Les sociétés se fracturent et cela n’augure rien de bon.

Ce sentiment de repli n’est pas étranger à l’écart grandissant entre les classes sociales et à l’enrichissement honteux des plus riches du globe. Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (Unicef) le dénonce chaque année. Au Forum économique mondial de Davos en janvier dernier, on a beaucoup insisté sur le fait que le fossé grandissant entre les riches et les pauvres, depuis la crise financière mondiale de 2008, nuit aux efforts déployés pour réduire la pauvreté mondiale et alimente les discours populistes. Selon Oxfam, seulement 62 personnes possèdent la même quantité de richesses que la moitié des habitants de la planète, comparativement à 388 il y a cinq ans. Pendant que la richesse de la moitié la plus pauvre de la population (3,6 milliards de personnes) a chuté de mille milliards (41 %) depuis 2010, la richesse de l’élite a augmenté d’environ 500 milliards de dollars américains. Aux États-Unis, entre 2008 et 2013, le revenu moyen disponible par ménage des 10 % plus riches a crû de 10,6 %, tandis que celui des 10 % plus pauvres a reculé de 3,2 %. M. Trump, comme d’autres leaders populistes à travers le monde, a su non seulement canaliser ce sentiment de laissé-pour-compte, mais il a aussi attisé la colère de millions d’Américains. Et il a gagné son pari.

Pour le Canada, les prochaines années risquent d’être difficiles. Rappelons que nous exportons plus de 75 % de tous nos produits aux États-Unis. Comme le disait au lendemain de l’élection l’économiste principal au Mouvement Desjardins, Francis Généreux, « une des principales craintes économiques entourant M. Trump est son instinct protectionniste. Les républicains soutiennent qu’une renégociation des accords commerciaux et une approche plus ferme pour tout ce qui touche les échanges internationaux seront favorables à la croissance ». J’ai bien peur que le conflit du bois d’œuvre, qui perdure depuis plusieurs années, ne soit pas près de se régler.

C’est pourquoi les propos du premier ministre canadien, qui s’est dit « ouvert » à renégocier l’ALENA moins de 48 heures après l’élection, sont plutôt surprenants. Toute renégociation de cet accord risque de se traduire par des pertes pour le Canada.