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Montagnes russes tarifaires

Publié le 14 mars 2025 - Écrit par Martin Caron, président général

Catégorie :

  • Producteur/Productrice
  • Textes d’opinion

Le président américain, Donald Trump, répète depuis plusieurs années que le mot « tarif » est « le plus beau dans le dictionnaire ». Il a certainement démontré, ces dernières semaines, que son admiration pour cette forme de protectionnisme est encore bien vivante.

La succession de tarifs, de reports et de contre-tarifs, depuis le début mars, est étourdissante. Une chatte y perdrait ses petits, comme on dit. Une situation qui n’est pas sans répercussions sur l’économie américaine, comme en témoignent les préoccupations exprimées par une multitude de secteurs, comme l’automobile, et la chute radicale et persistante des principaux indices boursiers. Plusieurs fonds de retraite, aux États-Unis, expriment d’ailleurs leur désarroi.

De notre côté de la frontière, selon un récent sondage de la firme KPMG, environ 67 % des chefs d’entreprise affirment qu’ils pourront tenir le coup au moins 12 mois, advenant l’imposition de tarifs américains de 25 %. C’est dire qu’environ 33 % considèrent qu’ils ne réussiraient pas, un son de cloche particulièrement inquiétant s’il en est un.

Les préoccupations du milieu agricole et forestier canadien sont aussi bien vivantes. Des milliers d’entreprises pourraient être frappées de plein fouet dès le 2 avril prochain, date à laquelle une multitude de tarifs américains (nouveaux ou reportés) et de contre-tarifs canadiens (25 % sur l’équivalent de 125 G$ de marchandises américaines, en plus celle des 30 G$ en vigueur depuis le 4 mars) pourraient entrer en vigueur.

Les droits de douane supplémentaires annoncés récemment par la Chine sur plusieurs produits agricoles canadiens, incluant le porc (25 %) et les produits du canola (100 %), tombent quant à eux à un bien mauvais moment.

À notre demande, les divers secteurs de production ont identifié plusieurs produits américains ciblés par les contre-tarifs canadiens devant être retirés de la liste, de façon à éviter aux productrices et producteurs de chez nous un double impact tarifaire. À titre d’exemple, dans le secteur des fraises et framboises, les plants fraisiers doivent être retirés de la liste puisqu’ils sont en grande partie importés des États-Unis.

Autres exemples de produits à retirer : les semences et transplants dans le secteur maraîcher, les œufs fertilisés destinés à l’incubation dans celui de la volaille, les abeilles dans le secteur apicole (le Canada importe environ 300 000 reines chaque printemps), les engrais, les semences et la machinerie dans celui des grains, etc. Tous les exemples recensés, dans tous les secteurs de production, seront rapidement transmis aux autorités compétentes.

Les secteurs de production qui exportent une grande part de leurs produits aux États-Unis ont très bien décrit, ces dernières semaines, les conséquences potentielles du conflit tarifaire sur la pérennité de leurs entreprises. Rappelons que la majeure partie des exportations bioalimentaires québécoises était destinée au sud de la frontière en 2024 (72 % en 2024; 9 G$). Cela dit, les références répétées (et croissantes) de M. Trump au marché laitier canadien sont tout aussi préoccupantes.

Encore tout récemment, ce dernier a menacé d’imposer des tarifs « réciproques » sur les produits laitiers canadiens, en réponse « aux droits de douane de 250 % imposés par le Canada sur les importations de produits laitiers américains ». Plusieurs médias canadiens et américains ont souligné que de tels droits ne s’appliquent qu’une fois les volumes autorisés dépassés (ce qui n’arrive pratiquement jamais). Certains (comme CNN) ont même qualifié de « mensonges » les affirmations de M. Trump selon lesquelles les tarifs canadiens ont augmenté pendant la présidence de Joe Biden.

Le plus désolant demeure toutefois l’opinion mal avisée de certains intervenants qui considèrent que démanteler en tout ou en partie la gestion de l’offre (40 % de l’agriculture québécoise) apaiserait l’appétit du président américain et mettrait fin à l’actuel conflit tarifaire. Un tel geste, en plus du non-sens économique et alimentaire qu’il représenterait, serait d’une naïveté sans nom.