Texte d'opinion de Marcel Groleau, président général de l'UPA
La Ville de Montréal a annoncé récemment qu’elle entend interdire la vente et l’utilisation de plusieurs pesticides sur son territoire. Parmi les exceptions prévues à son règlement, Montréal devrait exclure la zone et les activités agricoles (comme elle l’a fait pour les terrains de golf). En voici les principales raisons.
D’abord, parce que la réglementation du gouvernement du Québec sur l’usage des pesticides en agriculture est déjà l’une des plus sévères au Canada. Les activités agricoles sont présentes partout sur le territoire québécois, là où le climat le permet. Notre agriculture est diversifiée, à l’image des différentes régions. On compte plus de 28 000 fermes réparties sur le territoire québécois, très majoritairement familiales. Les agricultrices et les agriculteurs de chez nous sont sensibles aux préoccupations des citoyens quant au recours aux pesticides. Les pratiques agricoles se diversifient pour limiter leur usage et la production biologique progresse. À l’heure actuelle, les solutions de rechange aux pesticides sont plus nombreuses, mais ne permettent pas encore de bannir leur utilisation dans tous les cas. La recherche permettra peut-être d’y arriver.
Le gouvernement du Québec a adopté l’automne dernier le Plan d’agriculture durable 2020-2030. La population et les producteurs ont très bien accueilli cette initiative qui repose sur trois principes : appuyer les productrices et les producteurs qui mettent de l’avant de bonnes pratiques agroenvironnementales; améliorer l’accompagnement professionnel offert aux agricultrices et aux agriculteurs; investir dans la recherche pour leur offrir des solutions viables permettant de remplacer les pesticides. La lutte aux ravageurs des cultures, toutes productions confondues, est complexe, d’autant que les changements climatiques s’ajoutent à cette complexité. Les signaux sont cependant encourageants. L’offre de pesticides biologiques augmente et ces produits sont de plus en plus utilisés. La vente de néonicotinoïdes et de pesticides sous prescription est en baisse. L’indice de pression (quantité de pesticides vendus par hectare) diminue constamment depuis près d’une décennie.
Ensuite, on compte plus de 1 000 municipalités au Québec. Si chacune d’elle avait sa propre réglementation sur l’usage des pesticides en agriculture, ce serait tout simplement ingérable et inefficace. Auraient-elles les ressources pour faire respecter leurs règlements? La Ville de Laval, à l’instar d’une centaine de municipalités québécoises, a aussi adopté un règlement pour gérer l’usage des pesticides sur son territoire. Mais, elle a exclu de son règlement la zone et les activités agricoles.
Soyons pragmatiques. À court terme, le bannissement pur et simple des pesticides en agriculture ne réglera rien, si ce n’est que nous importerons davantage d’aliments de pays qui ont des règles moins sévères que les nôtres, ou d’autres provinces canadiennes. Les frontières ne sont pas fermées. À l’heure où nous nous préoccupons tous de notre autonomie alimentaire, ce serait un non-sens. La véritable solution est dans la recherche, la formation et l’accompagnement des productrices et des producteurs.
Les États-Unis et l’Europe investissent beaucoup plus que le Canada en matière agroenvironnementale. La présente campagne électorale doit favoriser le positionnement de chaque formation politique en vue d’une agriculture plus verte. Pour répondre à cet enjeu important pour la population, l’UPA propose la mise en place d’un nouveau programme (Agri-vert) pour soutenir le virage agroenvironnemental.
Nous souhaitons tous diminuer la dépendance de notre agriculture aux pesticides, mais la multiplication des réglementations municipales en matière agricole n’est pas la solution. Cet enjeu dépasse de beaucoup les territoires de chacune d’elles.