Dans un texte récent This link will open in a new window, le doyen de la faculté de management et professeur titulaire à l’Université Dalhousie, Sylvain Charlebois, y va d’un autre coup de gueule contre l’Union des producteurs agricoles (UPA). Son manque de rigueur, les amalgames et les raccourcis qu’il prend pour faire connaître son point de vue détonnent chaque fois. Mais là, il dépasse l’entendement. Sa dernière diatribe contre l’UPA s’explique difficilement : elle est gratuite et méprisante envers les producteurs québécois.
En fait, c’est le même genre de mépris qu’il exprimait dans un texte d’opinion il y a 12 ans This link will open in a new window, au moment où il quittait le Québec pour la Saskatchewan. Il y allait d’une charge similaire envers le Québec. Je comprends maintenant que l’UPA représente ce qu’il méprise le plus dans la société québécoise.
Cette énième sortie rappelle aussi sa présentation à la commission Pronovost en 2008 dans laquelle il dénonçait, au nom de l’Institut économique de Montréal, « les pouvoirs monopolistiques des offices de commercialisation agricole ». « Les gouvernements du Québec et du Canada doivent mettre en place des réformes afin de libéraliser le secteur de l’agriculture et le plus tôt sera le mieux », écrivait-il dans son mémoire. En d’autres mots, l’abolition pure et simple des plans conjoints.
L’action collective a toujours été à la base de l’économie agricole québécoise.
Bien avant les plans conjoints, l’aide des voisins et de la parenté lors des corvées suppléait à la main-d’œuvre familiale et aux faibles revenus générés par la vente des produits agricoles. Nous étions des milliers de producteurs qui acceptions ce que l’on voulait bien nous offrir pour nos produits.
L’Union catholique des cultivateurs, devenue l’UPA, est issue de cette culture d’entraide et de partage; l’enrichissement collectif pour l’avancement de la société. De toute évidence, ce concept déplaît à M. Charlebois. En 1972, le gouvernement libéral a adopté la Loi sur les producteurs agricoles. La lecture des travaux parlementaires de l’époque nous apprend que le choix du législateur était fondé sur « la nécessité de créer un rapport de force, tenant compte du grand nombre de producteurs, de l’isolement de ceux-ci, de la similitude voire de l’uniformité des problématiques, de l’importante taille et du nombre réduit des autres intervenants ». Les mêmes considérations prévalent aujourd’hui et l’ouverture des marchés n’a fait qu’exacerber cette situation. Le législateur reconnaissait que tous les producteurs bénéficient de l’action collective et qu’il était conséquemment équitable que tous participent à son financement. Une notion d’équité qui échappe à M. Charlebois.
L’UPA a joué un rôle essentiel en favorisant la mise en marché collective pour que les producteurs améliorent la proportion de leurs revenus provenant du marché. Même regroupés, ils possèdent un rapport de force limité : les produits agricoles sont périssables et le rendement de la production demeure imprévisible.
L’UPA a toujours milité pour des outils de gestion des risques, comme l’assurance récolte, l’assurance stabilisation des revenus agricoles et les programmes en cas de catastrophes. Les prix sur les marchés agricoles peuvent varier du simple au double d’une année à l’autre. Les aléas de la météo, de même que les maladies, peuvent affecter grandement les troupeaux et les récoltes. En favorisant la stabilité par un meilleur partage des risques, on stimule les investissements, on favorise l’innovation et l’on facilite le transfert des entreprises aux générations suivantes.
Le Québec figure au premier rang des provinces canadiennes dans les secteurs du lait et du porc. Grâce à l’action collective, l’acériculture est devenue l’un de nos fleurons sur les marchés internationaux. Notre agriculture crée plus d’emplois, car nous transformons 70 % de ce que nous produisons. L’âge moyen des agriculteurs est plus bas qu’ailleurs au Canada et le pourcentage des moins de 40 ans qui travaillent à temps plein à leur ferme est plus élevé.
Pour toutes ces raisons et plusieurs autres, les producteurs agricoles québécois sont grandement attachés à leur Union. C’est bien connu, l’union fait la force et je ne vois aucune raison pour que les producteurs ou le gouvernement se privent de cette force.