Comme il fallait s’y attendre, le thème de l’inflation s’est rapidement imposé comme l’un des enjeux majeurs de la campagne électorale. Selon Statistique Canada, l’Indice des prix à la consommation (IPC) a augmenté de 7,6 % d'une année à l'autre en juillet. C’est moins qu’en juin (8,1 %) en raison du ralentissement de la croissance des prix de l'essence. Si l’on exclut cette donnée, les prix se sont accrus de 6,6 % ces douze derniers mois (6,5 % en juin). La pression à la hausse exercée sur les prix demeure donc généralisée.
La période inflationniste dans laquelle nous vivons n’affecte pas uniquement le portefeuille des consommateurs. Elle a aussi une incidence directe sur la profitabilité des entreprises. Rappelons que pour l’année 2021, les recettes monétaires agricoles au Québec s’élevaient à 11,2 G$ (incluant des paiements directs de 573 M$). Le revenu net, une fois l’ensemble des coûts de production pris en compte, n’était toutefois que de 1,3 G$.
Sachant que le prix moyen de l’alimentation animale, des engrais et du carburant a grimpé d’environ 50 % depuis l’automne (1,5 G$ en dépenses additionnelles sur une base annuelle) et que chaque augmentation de 1 % des taux d’intérêt diminue le revenu net d’environ 19 % (250 M$), il est clair que la rentabilité des entreprises agricoles, en 2022, sera directement touchée.
Cette pression s’ajoute à d’autres facteurs. Parmi les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques, le Canada est celui qui a le plus diminué son soutien à l’agriculture, surtout depuis les coupes importantes de 2013. La situation n’est guère plus reluisante du côté québécois, les budgets dévolus au secteur agricole étant sensiblement les mêmes qu’en 2010, malgré une hausse des recettes monétaires d’environ 50 % pendant la même période et l’adoption, en avril 2018, d’une politique bioalimentaire ambitieuse.
Les productrices et les producteurs doivent aussi pouvoir compter sur des programmes de gestion des risques d’entreprise (GRE) qui leur permettent de faire face aux difficultés inhérentes à leur métier et de traverser les crises. Ce n’est pas le cas présentement. Les programmes actuels ne permettent plus de gérer efficacement les risques climatiques, phytosanitaires, économiques et commerciaux qui mettent en péril la rentabilité de nos entreprises. Il est impératif d’actualiser, d’indexer et d’adapter les programmes de GRE, dont plusieurs sont financés en partie par les contributions des productrices et des producteurs.
En clair, dans un contexte d’endettement croissant, de rentabilité moindre et de pénurie de main-d’œuvre, on demande à nos entreprises de contribuer davantage à l’autonomie alimentaire, d’être toujours plus compétitives, de répondre aux attentes sociétales, de s’adapter aux changements climatiques et de saisir toutes les occasions sur les marchés. Or, le soutien pour atteindre tous ces objectifs n’est tout simplement pas au rendez-vous.
C’est pourquoi l’UPA demande au prochain gouvernement de favoriser la résilience des entreprises agricoles du Québec en augmentant de 50 % (500 M$) les budgets dévolus au secteur agroalimentaire québécois et en versant rapidement une aide spécifique aux entreprises agricoles pour pallier la hausse fulgurante des coûts de production et la montée vigoureuse des taux d’intérêt.
Nos entreprises agricoles sont au cœur du tissu rural de la province. Elles façonnent le visage des régions sur les plans à la fois géographique, communautaire et économique. Leur potentiel de croissance est presque sans limites, en raison notamment de la demande alimentaire croissante, de la qualité de nos produits et de l’enthousiasme de nos concitoyens pour les produits d’ici. Rappelons-nous toujours qu’investir en agriculture, c’est aussi investir dans la santé des Québécoises et des Québécois, dans l’économie de la province et dans le garde-manger des générations futures. Le prochain gouvernement québécois doit, comme les productrices et les producteurs, avoir de l’ambition!