Dans notre chronique du 6 mars 2019, nous vous avons présenté l’exception agricole prévue à la Loi R-20. Dans celle du 26 avril 2019, nous avons abordé le volet important de la sécurité des chantiers. Dans ce 3e et dernier volet portant sur les travaux de construction à la ferme, nous souhaitons clarifier les règles applicables à la nécessité pour le constructeur-propriétaire ou l’entrepreneur de se procurer une licence lorsque ces derniers effectuent des travaux de construction sur une ferme.
Selon la loi sur le bâtiment, une licence d’entrepreneur ou une licence de constructeur-propriétaire est requise pour effectuer des travaux de construction d’un « bâtiment utilisé…pour abriter ou recevoir des personnes, des animaux ou des choses (matériaux, installations, équipements) ou pour un ouvrage de génie civil ou encore pour les travaux préalables d’aménagement du sol ».
Par « entrepreneur», la loi le définit comme « une personne qui, pour autrui, exécute ou fait exécuter des travaux de construction ou fait ou présente des soumissions, personnellement ou par personne interposée, dans le but d’exécuter ou de faire exécuter, à son profit de tels travaux ». Quant au «constructeur-propriétaire», il s’agit « d’une personne qui, pour son propre compte, exécute ou fait exécuter des travaux de construction ».
Ainsi, si vous souhaitez effectuer des travaux de construction sur votre ferme par vous-même ou avec l’aide d’employés, vous êtes tenu de vous procurer une licence de constructeur-propriétaire auprès de la Régie du bâtiment à moins que vous puissiez démontrer en être exempté conformément à la loi ou son règlement d’application. Il en est de même pour l’entrepreneur qui se voit confier le soin de procéder à des travaux : celui-ci devra se procurer une licence d’entrepreneur à moins de bénéficier d’une exemption.
Pour pouvoir être exemptés de se procurer une licence, les travaux de construction doivent être effectués sur une exploitation agricole mise en valeur habituellement par l’exploitant lui-même ou par moins de trois salariés embauchés de façon continue.
Dans le calcul du nombre d’employés, les critères suivants s’appliquent :
- Les salariés visés sont les employés de la ferme;
- Les salariés à temps plein et à temps partiel embauchés à l’année doivent être comptabilisés dans le calcul puisqu’il y a continuité dans le lien d’embauche;
- À l’inverse, les salariés saisonniers, soit ceux pour lesquels il y a eu rupture du lien d’emploi au cours d’une année, ne sont pas pris en compte dans le nombre;
- Les patrons (actionnaires, administrateurs) qui se versent un salaire ne devraient pas être calculés dans le décompte. Toutefois, cette question n’a jamais été tranchée par les tribunaux.
À noter que sur son site Internet, la Régie du bâtiment spécifie que les bâtiments, équipements ou installations visés par l’exemption sont ceux érigés sur une exploitation agricole (ex. maison de l’exploitation et ses annexes, garage, grange, étable, fosse à purin, pont, serre). Par conséquent, on peut penser que les autres bâtiments, soit ceux qui sont utilisés à des fins de transformation, de conditionnement ou de commercialisation, sont visés par l’obligation générale de détenir la licence appropriée, même si la ferme compte moins de trois salariés embauchés de façon continue.
Par ailleurs, l’exemption ne s’applique jamais aux travaux d’installations électriques ou de gaz et la licence appropriée est alors toujours requise pour vous-même ou votre entrepreneur.
Le défaut de détenir la licence requise rend le contrevenant passible de sanction pénale.
D’autres exemptions à l’obligation de détenir une licence sont prévues dans la loi et la réglementation et pourraient s’appliquer à votre situation (par ex. travaux de rénovation de votre propriété de moins de 20 000$).
Les outils mis en ligne par la Régie du bâtiment sont très utiles pour déterminer si une licence est requise et laquelle.
Par Me Marie-Andrée Hotte
Me Marie-Andrée Hotte cumule plus de trente ans d’expérience en litige civil ainsi qu’en litige pénal. Elle possède une pratique variée en droit des assurances, en droit des obligations et en matière de responsabilité civile et pénale. Au fi l des ans, elle a aussi développé une expertise particulière dans le domaine de l’énergie.
Suivez-nous chaque mois et n’hésitez pas à nous transmettre les questions et les sujets qui vous interpellent à l’adresse suivante : bhlf@upa.qc.ca. Vous pouvez aussi consulter notre site Internet au upa.qc.ca/bhlf-avocats. |