L’inflation, les taux d’intérêt, le soutien et l’accompagnement en deçà des attentes et des besoins, l’actualisation urgente des programmes, la lourdeur administrative ainsi que les menaces grandissantes au territoire et aux activités agricoles et forestières ont monopolisé les discussions durant la dernière année. Tout comme l’impact désastreux des événements climatiques extrêmes (plus particulièrement dans le secteur horticole), les effets de la restructuration du secteur porcin ainsi que les défis particuliers des régions périphériques, des secteurs éloignés et des fermes de proximité.
Le thème du 99e congrès général de l’UPA, « Agriculture et foresterie viables et durables », ainsi que la marche pour la relève agricole et l’avenir de nos fermes, en marge de l’événement, s’appuient sur ces enjeux. Les messages répétés à l’endroit des gouvernements sont clairs : tous ces aspects doivent être revisités si l’on souhaite faire de l’autonomie alimentaire une véritable priorité nationale. C’est non seulement l’avenir alimentaire des Québécoises et Québécois qui est en jeu, mais aussi celui de la profession.
Selon Statistique Canada, la proportion d’agricultrices et d’agriculteurs québécois travaillant à l’extérieur de leur exploitation est passée de 36 % en 2015 à 46 % en 2020 (jeunes de la relève : 44 %). Plus de 66 % d’entre eux ont déclaré travailler hors ferme 30 heures et plus par semaine. C’est énorme!
Toujours selon Statistique Canada (2021), seulement 62 % des familles agricoles au Québec ont déclaré que les revenus de l’exploitante ou l’exploitant agricole représentent la majorité de ceux de la famille (64 % en 2016). Ce pourcentage varie d’un secteur de production à l’autre (entre 60 % et 70 %), sauf dans les secteurs sous gestion de l’offre (un peu plus de 50 %).
Que penser de ces statistiques? Elles ne permettent pas, à elles seules, de conclure que tous ces exploitants et exploitantes ainsi que leurs conjointes et conjoints doivent nécessairement travailler à l’extérieur de la ferme pour « arriver ». Mais elles ne permettent pas non plus de conclure l’inverse. Il y a, dans ce portrait du secteur agricole, une réalité qu’il faudrait creuser davantage. D’abord, parce qu’il s’agit d’une tendance à la hausse. Ensuite, parce qu’elle est possiblement (certains diraient certainement) symptomatique d’une réalité inquiétante sur l’avenir de la profession et de la relève.
Ce qu’on peut dire avec assurance, c’est que le portrait de nos entreprises et, par incidence, de la ruralité est en train de changer sous nos yeux. Les enjeux économiques, territoriaux ou environnementaux que nous soulevons depuis plusieurs années, tout comme ceux de la relève, méritent une attention particulière des gouvernants. Il se passe quelque chose, c’est clair aux yeux de tout le monde. On m’en parle constamment dans les diverses assemblées et les statistiques tendent à le démontrer.
Les productrices et producteurs agricoles et forestiers travaillent de longues heures chaque semaine. Ils doivent conjuguer avec des marchés de plus en plus volatils, des risques de plus en plus élevés, des règlements qui influent directement sur leurs pratiques, des intrusions croissantes en zone verte et des obligations administratives et sociétales grandissantes. La reconnaissance, la compréhension des enjeux et la prise en compte de notre réalité sont-elles toujours au rendez-vous?
Nous avons très certainement, à l’aube du 100e anniversaire de notre organisation, un rendez-vous avec l’histoire agricole, forestière, rurale, territoriale et alimentaire du Québec. Les décisions prises aujourd’hui auront des répercussions dans l’assiette des Québécoises et des Québécois pour les 10, 20, 100 prochaines années. Et cet avenir commence maintenant. À tous et toutes, bon 99e congrès et bonne marche!