L’Union a participé, le 8 février dernier, aux consultations prébudgétaires 2023-2024 du ministre québécois des Finances, Eric Girard. Cet exercice annuel alimente la réflexion du gouvernement et oriente ses choix en vue du prochain discours sur le budget. Il s’agit donc d’un moment important au regard de la défense et de la promotion des intérêts agricoles et forestiers du Québec.
Déjà confrontées à des défis énormes, en l’occurrence économiques, environnementaux, climatiques et territoriaux, les entreprises agricoles et forestières, petites et grandes, ont été frappées de plein fouet par la hausse fulgurante des coûts de production (supérieure à l’indice des prix à la consommation) et la flambée des taux d’intérêt. Le secteur affiche encore un bon potentiel de croissance (estimé à 20 % d’ici 2030), mais les investissements requis ces dernières années pour répondre aux attentes sociétales, l’endettement qui en a résulté, la hausse des coûts de main-d’œuvre (passée et à venir) et les lacunes au regard du soutien gouvernemental (6 $ de soutien par 100 $ de revenus – un ratio parmi les plus faibles au monde [OCDE : 11 $] proportionnellement à la valeur de la production) compromettent la rentabilité, voire la pérennité, de milliers d’entreprises.
C’est pourquoi l’Union a demandé au ministre des Finances une hausse importante des budgets agricoles (+ 500 M$ par année) afin de rattraper le surplace des dix dernières années. Une partie importante de ce montant devrait être affecté rapidement au Plan d’agriculture durable, au programme Agri-Québec Plus (une aide complémentaire au programme Agri-stabilité) et au remboursement des producteurs pour le coût de la tarification du carbone associé à l’achat des carburants et combustibles fossiles (69,9 M$ en 2022; 337 M$ depuis 2015), à l’instar de ce que reçoivent la très grande majorité des agriculteurs des autres provinces.
Les demandes de l’Union comprennent aussi la création d’un crédit d’impôt (ou une bonification du programme Agri-Québec) pour les entreprises ayant une forte proportion de dépense de main-d’œuvre afin de limiter les effets de la hausse rapide du salaire minimum. La bonification des aides à la relève (capital patient, programme de protection contre la hausse des taux d’intérêt et programme d’appui financier à la relève agricole) et au secteur forestier (mise en valeur des forêts privées et programme de protection des petites forêts privées contre l’épidémie de la tordeuse) fait aussi partie des solutions urgentes pour diminuer la pression sur nos entreprises et regarder positivement l’avenir.
Du côté fiscal, le gouvernement québécois devrait notamment accorder aux entreprises agricoles générant des revenus annuels bruts de 50 000 $ et moins (40 % des fermes) un crédit d’impôt à l’investissement pour l’achat d’équipements et de machineries agricoles. Il doit aussi modifier la législation afin que les entreprises agricoles puissent récupérer les taxes (TPS/TVQ) payées pour la construction ou l’entretien d’immeubles utilisés aux seules fins d’héberger temporairement des TET, qui sont considérés comme des immeubles agricoles selon le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec. Le gouvernement du Québec doit finalement faciliter et favoriser les transferts d’entreprises, tout en modifiant les conditions requises, parfois contraignantes.
Ces recommandations visent à assurer la pérennité des entreprises et l’accomplissement de leur mission fondamentale, qui est de nourrir les consommateurs d’ici et d’ailleurs. Des mesures spécifiques aux circonstances actuelles, c’est-à-dire l’inflation et les taux d’intérêt, sont toutefois requises rapidement. Je pense notamment à la création d’un programme d’aide financière (de type « compte d’urgence ») à l’intention des entreprises agricoles en grande difficulté et à la bonification du programme Agri-Québec pour celles situées dans les régions périphériques. Les entreprises de ces régions doivent en effet assumer des coûts supérieurs en raison de leur situation géographique. Il importe aussi d’actualiser la rémunération de l’exploitant dans le Programme d’assurance stabilisation des revenus agricoles et de mettre en place des mesures afin de s’assurer que le prix du diesel coloré payé par les entreprises agricoles est inférieur à celui du diesel clair. Une situation exceptionnelle appelle des mesures exceptionnelles, et le contexte économique de la dernière année justifie amplement une « opération inflation » d’envergure.