Une cohabitation harmonieuse
Accroître notre autonomie alimentaire implique que nous permettions à nos agriculteurs de pratiquer leur métier au quotidien et d’occuper le territoire, avec tous les avantages et les défis que cela implique.
On le constate, de plus en plus de citadins viennent s’installer en milieu rural, séduits par le charme bucolique de la campagne. Ils ne sont toutefois pas tous familiers avec les réalités et les contraintes de l’agriculture et réalisent que leur nouveau milieu de vie peut engendrer quelques désagréments. Pour favoriser le bon voisinage, il est important d’apprendre à se connaître et à communiquer.
Côtoyer l'agriculture, un plaisir!
Même si l’économie des régions s’est sensiblement diversifiée ces dernières décennies, l’agriculture est toujours un élément essentiel de la vitalité rurale. Elle constitue une trame de fond importante à la vie des communautés, en assurant une occupation dynamique du territoire.
Le milieu agricole présente bien d’autres avantages pour les citoyens, dont la beauté des paysages et l’accès à des produits frais et hyper locaux. Les produits du terroir sont aussi une grande source de fierté pour les habitants de la région. De plus, l’agriculture permet de freiner l’urbanisation et stimule l’agrotourisme, activité économique plus populaire que jamais.
… Et parfois quelques défis
Les nouveaux résidents ont vite fait de constater que la campagne est aussi le berceau de la culture de la terre, avec le cycle des saisons, qui se traduisent des tâches et obligations de toutes sortes. Des activités agricoles qui peuvent quelques fois occasionner des inconvénients.
Les fermes sont parfois ancrées sur un territoire depuis des générations et plusieurs ont choisi de pratiquer une agriculture de plus en plus durable. Il faut aussi savoir qu’elles ont également la responsabilité de respecter les multiples normes provinciales et les règlements municipaux visant à limiter les inconvénients liés à leur production.
Le bruit
À la campagne, on entend à l’occasion le bruit des animaux ou de la machinerie, des véhicules lourds et de l’équipement de ferme qui sont l’écho du travail des agriculteurs. Mais les pratiques en matière de nuisances sonores évoluent et de plus en plus d’agriculteurs ont adapté leur mode de travail…
Des solutions à notre portée
Parmi les solutions possibles, certains agriculteurs plantent des arbres près des bâtiments afin de diminuer la propagation des sons, ou encore utilisent des ventilateurs plus silencieux ou des dispositifs acoustiques absorbants. De plus, ils installent le matériel potentiellement bruyant dans un emplacement le plus éloigné possible du voisinage et, si cela est possible, tiennent compte du moment de la journée pour effectuer les travaux bruyants.
Certains agriculteurs préviennent même leurs voisins qui pourraient être incommodés par le bruit, en expliquant son origine.
Les odeurs
Bien qu’ils aient une odeur désagréable, le fumier et le lisier sont des engrais naturels importants pour la régénérescence des sols cultivables. En clair, ils nourrissent la terre pour que celle-ci puisse, à son tour, nous nourrir.
Des solutions à notre portée
Il est difficile d’offrir un milieu agricole dépourvu d’odeurs, mais les agriculteurs, conscients du problème, mettent en place des techniques efficaces pour diminuer les impacts de la fertilisation.
Par exemple, lors de l’épandage des fumiers, des machineries adaptées avec des rampes basses permettent de propulser le lisier plus près du sol, réduisant ainsi sa projection dans les airs et atténuant les émanations. L’approche de l’enfouissement permet aussi de limiter les odeurs et d’augmenter l’efficacité de la fertilisation.
Les haies brise-vent, ces arbres et arbustes qui sont plantés le long des champs, créent pour leur part une barrière contre leur propagation, tout comme l’entreposage du lisier dans des fosses étanches. On peut aussi installer un toit au-dessus des fosses, planter autour d’elles des écrans boisés qui agissent comme brise-odeurs ou améliorer les procédés de traitement des déjections.
La poussière
Les producteurs ont souvent recours à de la machinerie agricole qui risque de projeter de la poussière. C’est encore plus fréquent en période de sécheresse et de grands vents. Certaines activités comme le séchage de grains produisent une fine poussière jaune qui peut facilement incommoder les voisins. Si les agriculteurs ne contrôlent pas tous les éléments, certaines façons de faire permettent de limiter les nuages de poussière.
Des solutions à notre portée
Les haies brise-vent – à nouveau! – font partie des solutions disponibles. De la même manière, les cultures de couverture, semées entre deux cultures de production, permettent d’éviter que les sols ne prennent… la poudre d’escampette. Cette pratique favorise également l’enrichissement des terres, ce qui bénéficie de surcroît aux agriculteurs.
Les tracteurs sur les routes
Les agriculteurs n’ont parfois pas d’autre choix que d’emprunter la voie publique pour déplacer leur machinerie d’un champ à un autre. Heureusement, leur présence sur les routes est concentrée à certaines périodes, particulièrement à l’automne durant la période des récoltes, et au printemps lors des semis.
Mais un tel déplacement est invariablement risqué. Il faut donc apprendre à partager la route. C’est un défi quand le véhicule est imposant. D’autant plus que la vitesse maximale pour les véhicules agricoles avec une machinerie est de 40 km/h et qu’il leur est interdit de circuler dans l’accotement. Patience, prudence et respect mutuel doivent donc être la règle d’or afin d’éviter des accidents.
Des solutions à notre portée
Sachez d’une part qu’afin de faciliter la circulation, les agriculteurs prévoient leurs déplacements, le plus souvent possible, en dehors des heures de pointe. Par ailleurs (pour ceux qui l’ignoraient) le Code de la sécurité routière permet le dépassement d’une machinerie agricole en empiétant sur une ligne continue, simple ou double, uniquement si cette manœuvre est sans danger.
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La nature précieuse pour nous tous
La protection de l’environnement fait partie des préoccupations des citoyens… comme des agriculteurs. Ces derniers sont aux premières loges des contrecoups de dame nature et des changements climatiques. Au cours des dernières décennies, ils ont ainsi déployé de nombreux efforts pour réduire leur impact environnemental, adapter leurs pratiques de cultures en plus de se soumettre à une réglementation des plus exigeantes.
Préserver la santé des sols
Ressource essentielle pour la croissance des végétaux, la terre est l’actif le plus précieux des producteurs agricoles et leur principal outil de travail. Un sol vivant et productif est à la base de l’agriculture. Il requiert moins d’engrais et de fertilisant. Il est plus stable et moins propice à l’érosion. Il offre également une biodiversité importante, de même qu’une disponibilité accrue de nutriments.
Un sol en santé ne permet pas seulement aux végétaux de bien pousser, il a aussi un rôle essentiel dans le cycle de l’eau, l’épuration, la dégradation des polluants, la biodiversité et la réduction des gaz à effet de serre.
C’est pourquoi les agriculteurs travaillent en collaboration avec les agronomes, suivent des formations et s’informent sur les meilleures pratiques agroenvironnementales.
À savoir également : la fertilisation des cultures est une activité encadrée au Québec. En vertu du Règlement sur les exploitations agricoles, les producteurs doivent, tous les ans, obtenir un plan de fertilisation auprès de leur agronome. Ce dernier indiquera les doses de fumiers, d’engrais minéraux et de nutriments nécessaires aux besoins de leurs cultures et respectueux de l’équilibre du sol. Les agriculteurs tiennent également un registre des épandages de chaque producteur.
Parmi les approches assurant la santé des sols, les agriculteurs favorisent la rotation des cultures, la culture de plantes couvre-sol qui le protègent contre l’érosion et le nourrissent, la réduction du travail de machinerie et le recours aux semis directs, donc sans labour, en laissant les résidus de culture afin de fertiliser la terre…
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Limiter les pesticides
Les pesticides ont pour fonction de protéger les cultures des insectes nuisibles, des herbes envahissantes et des maladies. Sans eux, des récoltes entières pourraient être détruites et occasionner de lourdes pertes, donc une augmentation du coût des aliments.
Leur utilisation est très encadrée au Québec. L’agriculteur doit par exemple respecter des distances entre l’endroit où il répand des pesticides et les bâtiments, les cours d’eau, les sites de prélèvement d’eau, les pistes cyclables… Pour certains pesticides, les agriculteurs doivent même avoir une recommandation de leur agronome.
Le mot d’ordre général est de réduire l’utilisation des pesticides, n’utiliser que la bonne dose au bon moment et les remplacer lorsque cela est possible par d’autres pratiques alternatives. Les producteurs agricoles en font donc usage s’il n’y a pas d’autres moyens efficaces pour remédier à leur problème.
Car il existe des méthodes de lutte autres que chimiques. Elles sont biologiques, mécaniques, culturales ou génétiques. Elles assurent une réduction durable et efficace des nuisances. Parmi celles-ci on compte : la rotation des cultures et le recours à des alliés – dont certains autres insectes – que l’on retrouve naturellement dans l’écosystème.
Santé Canada impose par ailleurs des limites précises quant aux traces de pesticides pouvant se retrouver sur les aliments. Elles sont de 100 à 3 000 fois plus basses que le seuil de dangerosité. Le taux de conformité des fruits et légumes produits localement est plus élevé que celui des produits importés.
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Préserver la qualité de l’eau
L’eau est essentielle à la vie et indispensable à l’agriculture. Les producteurs mettent donc en place des techniques pour mieux encadrer son utilisation et pour veiller à la santé des rivières et des nappes phréatiques, portant une attention particulière à diminuer les risques de créer de la pollution d’origine agricole.
Utilisateurs d’eau, ils tentent aussi de gérer au mieux cette ressource, par exemple, en recourant à des systèmes d’irrigation performants ou en arrosant au pied des plants pour éviter l’évaporation et le gaspillage.
Les sédiments d’origine agricole peuvent se retrouver dans les cours d’eau par le ruissellement et par le vent. Les agriculteurs favorisent donc l’implantation de bandes riveraines, ces plantations d’arbres, d’arbustes ou d’herbes situées entre leurs cultures et les cours d’eau. Encadrées par une politique québécoise et par des réglementations municipales, les bandes riveraines contribuent à stabiliser les berges, filtrer les matières fertilisantes et les pesticides provenant du champ, retenir les sédiments emportés par l’eau de ruissellement, améliorer la qualité de l’eau et favoriser la biodiversité.
Pour leur part, les éleveurs maintiennent la qualité de l’eau et diminuent les risques de dégradation des berges due au piétinement des animaux en installant des sites d’abreuvement, en clôturant les abords des cours d’eau et en aménageant des passages pour le bétail.
Communiquer : plus qu’hier, moins que demain
Dans tous les cas, il est essentiel de garder à l’esprit qu’un agriculteur est dépendant de la température et du temps qu’il a pour mener à bien ses activités. Son travail n’est pas de tout repos et cohabiter dans un milieu agricole nécessite parfois de la patience et de la compréhension. La communication reste donc la clé pour assurer des rapports harmonieux entre les producteurs et les citoyens du voisinage.
Ainsi, les occasions de rencontres peuvent permettre de mieux comprendre la réalité de chacun. Les Portes ouvertes de l’UPA qui se déroulent chaque automne, les foires agricoles, les marchés fermiers, la cueillette d’un panier à la ferme, l’autocueillette… voilà autant de moments agréables dont il faut profiter pour notre plaisir mutuel et pour échanger!