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Ana Maria Martin : portée par la passion

Les visages de la relève syndicale

Ana Maria Martin

Implication
Administratrice, secteur d’Henryville de 2018 à 2022, puis vice-présidente depuis juin 2022 du Syndicat local de l’UPA du Haut-Richelieu
Administratrice de 2020 à 2023 des Producteurs de lait de la Montérégie-Ouest, vice présidente de 2023 à 2024, puis présidente depuis février 2024 des Producteurs de lait de la Montérégie-Ouest

Née à Pampelune en Espagne, une municipalité de 200 000 habitants, Ana Maria Martin est portée par la passion qui caractérise cet endroit, car Pampelune est le théâtre de la fameuse course des taureaux qui souligne la fête de San Fermin. Notre productrice est dotée de la force, du courage et de la détermination de sa terre natale, des qualités qu’elle utilise ici pour défendre l’agriculture, pour dénoncer les injustices et construire un avenir meilleur.

C’est à l’invitation de son oncle, propriétaire d’un restaurant à Les Méchins, dans le Bas-Saint-Laurent… aux portes de la Gaspésie, que la jeune Ana Maria, âgée de 3 ans et demi, et sa maman viendront s’installer au Québec. À ses six ans, elles déménagent toutes deux à Laval, une ville qu’elle ne quittera qu’après avoir rencontré celui avec qui elle fondera une famille et aura une vie bien remplie! Cet homme, c’est Michel Lord, un producteur laitier de Henryville, vivement intéressé à prendre la relève de la ferme familiale. Le couple, qui est ensemble depuis 30 ans déjà, a eu quatre garçons, dont deux veulent devenir la 5e génération à exploiter la ferme familiale.

Au début, Ana Maria vient rejoindre Michel à la ferme tous les week-ends malgré la centaine de kilomètres qui séparent Laval et Henryville. Elle participe à toutes les tâches et s’intéresse à tout. La semaine, elle poursuit sa formation dans le domaine de la petite enfance. Diplôme en poche, Ana Maria décroche un emploi dans un CPE à Saint-Jean-sur-Richelieu et le couple s’installe non loin au village ce qui permet à Michel de se rendre à la ferme tous les jours alors qu’Ana Maria l’y rejoindra… après le boulot!

À la naissance de leur 4e enfant, Ana Maria décide de laisser son emploi pour se consacrer entièrement à sa nouvelle passion. Elle participe notamment à l’amélioration du cheptel et des infrastructures. C’est alors qu’elle prend connaissance des injustices et des problèmes rencontrés en agriculture. « J’ai appris qu’il y avait des réunions où on pouvait en apprendre plus et être entendus, là où on avait un droit de parole pour exprimer nos craintes, nos problèmes, nos interrogations. J’y suis allée, même si je n’étais pas actionnaire de la ferme. J’allais écouter ce qui se disait, puis un jour, je suis allée au micro. C’est là qu’en 2018 un membre m’a remarqué et m’a parlé d’un poste à combler au syndicat local. L’idée de pouvoir agir et faire la différence m’a plu. Je me suis donc fait élire comme administratrice au syndicat local du Haut-Richelieu pour le secteur d’Henryville. Je suis devenue la vice-présidente de ce syndicat local depuis 2022 », dit-elle, comblée.

Même si elle qualifie son engagement de « tout à fait naturel », elle ne s’est pas limitée qu’au syndical local. En tant que productrice laitière, elle voulait aussi s’impliquer pour sa production et devient administratrice des Producteurs de lait de la Montérégie-Ouest en 2021. Elle est élue vice-présidente en 2023, puis présidente en février dernier. Toujours la verve solide et ferme, elle représente fièrement ses pairs dans les rencontres régionales, provinciales et nationales. « Être au centre des discussions pour faire avancer les demandes, les négociations sur la rémunération ou les conditions de pratiques, les politiques ou pour apporter les suggestions provenant des autres producteurs, m’apporte beaucoup. J’aime savoir que je peux contribuer à faire avancer les dossiers, même s’ils ne me touchent pas du tout. Je mets autant de passion sur les dossiers qui me touchent que sur ceux qui n’ont rien à voir avec ma pratique agricole. »

À toutes les personnes qui hésitent encore à assister à une rencontre, elle aimerait leur dire : « On fait tous le même métier, on a sensiblement les mêmes problèmes. On a tous quelque chose à dire et à apporter. On peut tous faire la différence à notre façon. Il suffit de pousser la porte et entrer; chose certaine, vous serez bien accueillis. » Et sans hésiter, elle ajoute : « Faut pas rester seul dans son coin ou attendre d’avoir étiré l’élastique jusqu’à ce qu’il casse ». Cet ajout fait référence à son implication dans une autre cause qui lui tient réellement à cœur : la santé mentale des agriculteurs. C’est à l’invitation de la fédération régionale qui a souhaité qu’une personne par syndicat local s’implique dans le dossier de la santé mentale et, par la bande, auprès l’organisme Au cœur des familles agricoles (ACFA). Elle y a retrouvé plusieurs similitudes avec sa formation en petite enfance où elle avait étudié le fonctionnement émotionnel et la relation d’aide. Ana Maria s’implique dans les activités de collecte de fonds de l’ACFA afin de soutenir les actions essentielles que font les travailleurs de rang avec les producteurs et productrices agricoles. « Malheureusement, la santé mentale est encore un gros tabou pour plusieurs. Il y a tellement à faire de ce côté. »

La passion qui l’anime rejaillit-elle dans sa vie familiale? « Absolument, on est tous aussi passionnés dans la famille. Autour de la table au souper, les discussions sont nombreuses et animées. Mon fils Miguel (22 ans) est impliqué à la FRAQ, notamment à l’Association de la relève agricole de Saint-Hyacinthe (ARASH) et à la Relève agricole de Missisquoi-Iberville (RAMI) et mon plus jeune Rafael (13 ans) est conseiller junior à la municipalité. Enzo (17 ans), quant à lui, étudie à l’école d’agriculture de Saint-Romain. Et le 4e enfant? Ana Maria nous parle avec émotion d’Antoine qui a 20 ans et qui est multihandicapé. « Il ne sera jamais autonome. Il m’a fallu être très organisée pour réussir à faire tout ce que je voulais faire. Et je n’ai jamais baissé les bras » nous a-t-elle confié.

Ana Maria peut être fière de ses accomplissements. Elle souhaite vivement qu’un jour un gouvernement place l’agriculture comme véritable priorité nationale et reconnaisse son apport à l’économie. Ce faisant, ce sera à ce moment que de vrais outils seront mis en place pour reconnaître l’expertise et le professionnalisme de celles et ceux qui nourrissent la population trois fois par jour.

Les visages de la relève syndicale

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