Au nombre d’environ 10 000 et occupant près de 54 % (1,67 million d’hectares) de la superficie totale des exploitations agricoles de la province (3,14 millions d’hectares), les productrices et producteurs de grains québécois (céréales et oléagineux) façonnent depuis toujours le visage de nos campagnes, tout en contribuant très fortement à la production agroalimentaire de chez nous (5,38 millions de tonnes de blé, d’orge, de maïs-grain, de soya et de canola produits chaque année – environ 1,9 milliard $ en recettes issues du marché, ce qui en fait le troisième secteur agricole en importance au Québec) et à la création d’emplois (environ 20 000).
La majeure partie des grains produits au Québec est destinée à l’alimentation animale. Toutefois, ils sont aussi utilisés par les transformateurs alimentaires (haricots, pois, etc.), les minoteries, les malteries, les boulangeries, les producteurs de boissons alcoolisées, les producteurs de biocarburant, les fabricants de textiles, les producteurs de biocarburant et même par l’industrie pharmaceutique.
Ce secteur de production, à l’instar de plusieurs autres, est toutefois confronté à des défis majeurs. Lors d’une récente sortie à l’occasion de la rentrée parlementaire, les Producteurs de grains du Québec (PGQ), qui soulignent cette année leur 50e anniversaire, ont demandé au gouvernement du Québec de mettre de l’avant une politique de financement à long terme en matière d’agroenvironnement, plus particulièrement au regard de la rétribution des bonnes pratiques.
Cette requête est tout à fait légitime. Doté d’un budget de 125 M$ sur cinq ans, le Plan d’agriculture durable (PAD) 2020-2030 devra être renouvelé l’an prochain. Son financement est toutefois bien en deçà des besoins. À témoin, l’aide directe aux initiatives agroenvironnementales aux États-Unis représente 0,8 % des recettes monétaires agricoles, c’est-à-dire l’équivalent d’environ 104 M$ par année au Québec. On est donc très loin du compte.
Les PGQ ont aussi réclamé un meilleur soutien pour les fermes des régions périphériques, ces dernières étant confrontées à des coûts de transport plus élevés, à un accès plus restreint aux transformateurs et même, dans certains cas, à un choix de cultures plus limité. Ces réalités ont une incidence directe sur la compétitivité des entreprises, surtout dans un contexte de chute des marges en production de grains.
Ces deux grandes priorités, qui rejoignent les demandes de l’Union en vue du renouvellement de la Politique bioalimentaire du Québec l’an prochain, sont accompagnées d’autres préoccupations. Les PGQ rappellent fréquemment que les règles de tarification du carbone prônées par la province (marché Québec-Californie) créent un déséquilibre concurrentiel important entre les producteurs québécois et ceux du reste du Canada et du Midwest américain, qui évoluent dans les mêmes marchés.
Rappelons par ailleurs que les productrices et producteurs de grains québécois, comme celles et ceux des autres secteurs de production (et contrairement à leurs principaux compétiteurs), sont directement touchés par la lourdeur administrative et les nombreux resserrements réglementaires, ces dernières années.
Tout récemment, ils ont aussi fait état des inquiétudes des productrices et producteurs quant à la hausse des tarifs pour le gaz naturel, annoncé par Energir. Rappelons que le gaz naturel est essentiel pour le séchage des grains et qu’il s’agit donc d’un désavantage concurrentiel pour les productrices et producteurs québécois, leurs compétiteurs n’ayant pas à subir une telle hausse.
Les défis sont donc nombreux. D’où l’importance de miser sur la recherche et l’innovation : santé des sols et biodiversité, lutte aux changements climatiques (ex. : projet Agrisolutions climat), nouveaux cultivars et pratiques novatrices favorisant plusieurs récoltes, etc.
La production mondiale devrait atteindre plus de 3 milliards de tonnes en 2024-2025. Cela démontre à quel point nos productrices et producteurs de grains évoluent dans un marché de géants. S’y tailler une place durable est tout à fait possible, si le soutien et la confiance sont au rendez-vous.